Madame Li est un petit bout de femme dont le niveau de charisme est inversement proportionnel à sa taille. Numéro deux du géant chinois BYD, elle était récemment de passage à Bruxelles, où nous avons pu la rencontrer brièvement entre deux réunions menées tambour battant (voir son interview dans ce numéro). Un concentré d’énergie, qui impressionne par la précision de ses propos et la clarté de sa vision, parfaitement alignée avec celle de son groupe. Sans fausse modestie ni ambitions irréalistes, Madame Li incarne une stratégie solide, portée par des moyens colossaux, une volonté affirmée et une capacité d’innovation hors normes, soutenue par quelque 120.000 ingénieurs dédiés à la recherche et au développement. La machine de guerre est en marche.
Avec des têtes de pont établies en Hongrie et en Turquie, l’Europe est clairement dans la ligne de mire de BYD. Une cible plus prioritaire que les États-Unis, où la guerre commerciale et l’imprévisibilité de la politique douanière américaine – en particulier sous l’impulsion du président actuel – rendent le marché moins stratégique. Pour l’instant. Mais BYD débarque-t-il en terrain conquis, au terme d’une blitzkrieg sans résistance? Les choses semblent plus complexes. Longtemps en position de proie, le groupe Volkswagen montre aujourd’hui des signes de reprise. En tout cas sur le Vieux Continent.
BYD débarque-t-il en terrain conquis, au terme d’une blitzkrieg sans résistance?
Fragilisé par le Dieselgate et une offensive électrique prématurée marquée par des produits encore inaboutis et entachés de bugs, le constructeur allemand semble avoir redressé la barre. C’est en tout cas ce que révèlent les chiffres de JATO, qui compile les données d’immatriculations dans 28 pays européens. En avril dernier, le groupe allemand plaçait cinq modèles dans le top 10 des électriques les plus vendues, occupant même les quatre premières places: en tête, le Skoda Elroq, suivi des Volkswagen ID.3, ID.7 et ID.4. Le Skoda Enyaq se classe 8e. La Tesla Model Y, en baisse de 53%, se maintient de justesse en 9e position, désormais talonnée par la Citroën ë-C3.
Et les Chinois dans tout ça? Dans le Top 25 des modèles électriques les plus vendus en Europe en avril, pas un seul d’entre eux. Les choses ne sont en outre pas très différentes en Belgique puisqu’au terme du premier trimestre 2025, seuls quatre modèles appartenant au groupe chinois Geely (trois Volvo et une Polestar) figurent dans le top 30 des électriques les plus vendues chez nous. Le podium est toutefois monopolisé par BMW, Audi et Volkswagen suivant de peu. Alors bien évidemment, de cette photographie à un instant «T», il ne faudrait pas tirer de conclusion hâtive et relâcher sa garde. Mais si elle illustrait le fait que l’industrie automobile européenne ne part pas forcément démunie face à ce que d’aucuns annoncent comme un tsunami? Qu’en pense Madame Li?