Essai détaillé / Audi S6 Avant e-Tron: Cadre très supérieur

Les anciennes Audi A6 Avant (Diesel) figuraient en tête de liste des voitures les plus prisées en achat de société. Mais on doute que les patrons et petits indépendants suivent en masse l’inflation de cette version électrique. En 2019, l’excellente A6 Avant 40 TDI 204 ch démarrait à 53.950 €, un tarif que nous jugions «costaud, mais cohérent eu égard aux prestations et à l’équipement». 
Aujourd’hui, le premier break A6 Avant e-Tron (210 kW et petite batterie) démarre à 71.600 €. Une S6 Avant e-Tron vaut minimum… 101.550 €. Et notre modèle d’essai, avec ses options, est à 120.000 €. Hello Ingolstadt, ici la Terre! Rassurez-vous, ce n’est pas plus tentant à Munich ou à Stuttgart… Le marché des super-électriques est élitiste, c’est un fait, et Audi assume l’escalade autant que la volonté d’en profiter. Vendre moins, mais gagner plus. 
La vendre, oui, mais à qui? Les employés habilités à en disposer dans leur liste de voitures de société seront nettement plus rares. Et est-ce que le patron daignera rouler en break, fut-ce un S6 ? Une e-Tron GT à 128.000 € reste plus sexy, n’est-ce pas ? Ne négligeons pas la carotte fiscale: un indépendant père de famille qui bosse sans compter aimerait se faire plaisir avec ce joli break mangeur de 911… et déductible à 100%.  
Après de tels tarifs assommants, parler de consommation, donc d’économie d’énergie, semble déplacé. Sauf en ce qui concerne l’autonomie. Pas de chance, nous avons passé au crible cette S6 Avant e-Tron au pire moment de l’année, qui plus est chaussée des plus grandes jantes disponibles (21’’).  En quittant le siège de l’importateur, le thermomètre frôle avec 0°, notre grosse batterie chargée à bloc ne promet que… 433 km d’autonomie. Ce qui n’est pas mal, mais loin des plus de 600 promis officiellement! Quelques jours plus tard, avec 10°, l’économètre redevient plus optimiste, indiquant 500 km d’autonomie. Cette fraîcheur imposée et les variations de notre rythme de conduite ont fait fluctuer la consommation de 26,2 kWh/100 km à 17,7 kWh sur nos trajets province-Bruxelles. Notre «vraie» moyenne (relevée sur 500 kilomètres de maison-rédaction, en empruntant des autoroutes bouchonnées et de la ville à 30 km/h de moyenne), s’est stabilisée à 21,5 kWh, ce qui, en théorie, nous laisse 440 kilomètres de champs d’action. Eu égard au gabarit et au potentiel, c’est remarquable… à condition de privilégier une conduite de bon père de famille, en limitant les accélérations canons, mais sans se priver de chauffage (pompe à chaleur). Sur le planificateur d’itinéraire, un trajet simulé vers le sud de la France, d’environ 900 km, nous imposait «seulement» deux arrêts recharge rapide (en théorie deux fois une demi-heure). Faisable, donc.  
Le problème de la S6 Avant réside dans ses 503 ch. En profiter enflamme les réserves d’ions, de l’ordre de  50-60 kWh/100 km, ce qui fausse tout. Sauf si on assume et qu’on compte bien en profiter un maximum. Dans ce cas, on dispose d’une fenêtre récréative de 180-200 km (peut-être moins) avant de devoir passer à la prise. Un confrère allemand nous confiait qu’il s’agit d’un comportement courant dans son pays. L’automobiliste teuton empruntant l’autoroute pour se rendre au boulot à 40-50 km de chez lui ne se prive pas de croiser à 200 km/h, sachant qu’il rechargera suffisamment sur place pour rentrer, et ainsi de suite… Comprenez-nous: si c’est pour se priver en permanence du potentiel de la S6, mieux vaut envisager une A6 Avant e-tron propulsion moins puissante. Et moins chère. En résumé, une A6 Avant e-tron est sans conteste un break électrique longue distance… mais l’affirmation est moins vraie dans le cas de cette version S6.