Au début des années 60, l’époque est tendue pour Ford, entre la Maison mère américaine et les divisions anglaises et allemandes. Le Transit va servir de cobaye dans le projet d’unification des gammes germaniques et britanniques (ce qui deviendra plus tard Ford Europe). Priorité : en finir avec la concurrence interne (entre le Ford FK 1000/1250, aussi appelé plus tard Taunus Transit, et l’anglais Ford Thames 400E) et surtout générer des économies d’échelle, donc plus de profits.

À l’origine, le projet du Transit est baptisé Redcap et est téléguidé depuis les USA. C’est d’ailleurs le studio de design Ford aux États-Unis qui trace les premières esquisses : cabine spacieuse, moteur placé à l’avant, capot court. Ensuite, ce sont aux ingénieurs anglais et allemands d’« européaniser » l’engin et de développer sa technique, compte tenu des préférences locales. Il aurait pu se nommer le Ford « Série V », en référence à l’architecture des moteurs, mais les Allemands poussent finalement à reprendre l’appellation Transit, déjà allouée par le passé au Taunus Transit. L’état-major américain accepte, parce que le nom Transit jouit d’une compréhension quasi mondiale.
Pour le moteur, le choix se porte sur le V4, Ford jouissant déjà d’une grande expérience de cette architecture, et parce que ce moteur est compact. Particularité : il existe en fait deux V4 : le V4 Taunus allemand (1200, 1500 et 1700 cm³) et le V4 Essex anglais (1700 et 2 litres). En Diesel, le 4-cylindres en ligne reste de mise.

Genk entre en jeu
Si le site anglais de Langley est bien sûr considéré comme le berceau du Ford Transit, l’utilitaire à l’ovale bleu est aussi très vite assemblé chez nous, sur le site limbourgeois de Genk. Face à la demande, une usine à Amsterdam et une autre au Portugal – sans oublier la délocalisation anglaise du site de Langley vers celui de Southampton – s’ajoutent rapidement. Dès son lancement, le premier Transit se met au niveau de la rude concurrence dans le milieu (circuit imprimé au tableau de bord, portière latérale, ceintures de sécurité, moteurs essence et Diesel Perkins). Il est décliné rapidement en plusieurs versions (empattements court et long, différentes charges utiles). Le succès est en marche.
Les années 1970
La première génération de Transit va perdurer jusqu’en 1978, année de l’introduction du Mark II, en fait les mêmes fondements mais habillé d’un style beaucoup plus moderne (carré), qui fait référence pour certains au look du Ford Econoline américain. Il continue d’utiliser des moteurs V4 à essence, mais la demande pressante de Diesel conduit à la création du moteur York, un 2,4 litres à injection indirecte. Le Transit Mark II adopte des freins à disque assistés et peut désormais supporter 3,5 tonnes de charge utile.

Les années 1980 et 1990
En 1986, le Mark II passe le flambeau à une toute nouvelle génération, appelée Mark III, un chiffre qui le résume bien : trois empattements et trois possibilités de volume de chargement (6,0 – 6,6 – 8,4 m³). Dans les années 90, apparaissent les moteurs Turbo Diesel et l’électronique embarquée. Mais également de nouveaux standards de sécurité : airbags, ceintures trois points, systèmes antivol. On améliore aussi le confort de conduite et le design intérieur. La production franchit le cap du 3 millionième Transit.

Toute une famille
Le lancement de la 4e génération (Mark IV) donne naissance à une famille complète : Transit Connect, Transit Jumbo, Transit Courier. Les récompenses s’accumulent, dont celle de l’« International Van of the Year ». Le cap des 5 millions d’unités est franchi en 2005. Il sera produit jusqu’en 2013, mais avec un profond restylage en 2006.

Avec la cinquième génération (Mark V), qui continue d’évoluer en style et en équipement jusqu’à aujourd’hui, c’est l’ère de la mondialisation : production mais surtout vente aux États-Unis et au Canada (en fait, sur les 6 continents), où il prend le relais des mythiques E-Series. Introduction des moteurs EcoBlue et des premières versions hybrides. C’est aussi l’heure de l’électrification avec l’E-Transit de 2020 puis l’E-Transit Custom (2023). Plus que jamais, Ford multiplie les versions : Trail, Active, MS-RT, 5 tonnes.
Preuve de son statut, l’actuel Ford Transit/Custom sert de base à la dernière génération du Volkswagen Transporter, l’un de ses vieux et principaux concurrents.

La chute des bastions européens
Né en Europe occidentale, le Ford Transit va malheureusement quitter peu à peu ses terres. Tour à tour, les pôles d’assemblage du Transit disparaissent du paysage européen. En novembre 1981, le dernier Transit tombe des chaînes de montage de l'usine d'Amsterdam, vouée à fermer ses portes.
Explications américaines ? La baisse des ventes conjuguée au ralentissement du marché de l’automobile en Europe oblige le constructeur américain à restructurer ses filiales installées sur le Vieux Continent... Même le Royaume-Uni n’est pas épargné. À Southampton, la production annuelle de Ford Transit fléchit de 66.000 à 28.000 unités entre 2008 et 2011. En octobre 2012, un communiqué émanant de la direction européenne de Ford, installée à Cologne, annonce la fermeture de l'usine d’emboutissage de Dagenham, à l’est de Londres, et du site d’assemblage de Southampton… en direction de la Turquie !