Tony Verhelle n'a plus besoin d'être présenté. L'ancien rédacteur en chef du magazine AutoGids, revue sœur du Moniteur Automobile, a eu le privilège de prendre le café avec les grands noms de l'automobile pendant des décennies et suit encore aujourd'hui de près les évolutions du secteur.
Péril jaune, vraiment ?
Avant même que la Commission européenne ne décide d'introduire des droits d'importation supplémentaires sur les voitures électriques chinoises, Volvo avait déjà décidé de produire son plus petit modèle électrique, l'EX30, en Europe, et plus précisément chez nous, dans l'usine de Gand. L'EX30 a peut-être un style et un esprit « suédois », mais techniquement ses racines sont purement chinoises : au sein du Group Geely, le Volvo partage sa plate-forme et de nombreux autres composants avec les modèles Zeekr et Smart. Ce qui n’empêche pas une majorité d’acheteurs de le considérer comme un produit européen au charme scandinave, à l’instar de toutes les autres Volvo.
Le transfert partiel de la production vers Gand est sans conteste une aubaine pour l'usine Volvo. La récente disparition d'Audi Bruxelles a prouvé à quel point il peut être dangereux de dépendre de modèles qui arrivant en fin de cycle de vie. Aujourd’hui Volvo Gand est le seul site de notre pays qui assemble des voitures particulières à grande échelle, avec une capacité maximale d'environ 250.000 voitures. Bien loin des 1,2 million de voitures qui sortaient chaque année des chaînes de production belges dans les années 80, mais à Gand, on dit merci aux patrons chinois d’avoir choisi ce site pour assembler un modèle qui réalise des bons chiffres commerciaux.
« Le transfert partiel de la production de l'EX30 à Gand est une bénédiction pour l'usine Volvo »
Pourtant, beaucoup crient à nouveau au « péril jaune » cette grande menace qui traverse les décennies. Car nous tremblions plus ou moins sous les mêmes avertissements à la fin des années 70, lorsque les voitures japonaises prenaient leurs quartiers européens, et puis vingt ans plus tard, lorsque les Coréens ont commencé à « envahir » notre marché. Et voilà que le grand danger viendrait maintenant de la Chine, à qui nous ouvrons grand nos portes.
La Chine a décidé très tôt de se concentrer sur la production de voitures électriques, alors que nos constructeurs automobiles européens, sûrs d'eux et peut-être même arrogants, ont sous-estimé ce danger à l'époque et en subissent aujourd'hui les conséquences. Très bien d'appeler à « tous se retrousser les manches », or, nous aurions dû le faire il y a dix ans. Actuellement, environ 80 % de toutes les batteries dans le monde sont produites par des entreprises chinoises, le cinquième restant étant réparti entre les Coréens et Tesla. Le projet prestigieux d’une Europe productrice de batteries s'est distingué par le désastre de la récente faillite de Northvolt.
Avec l'introduction de l'EX30 à Gand, les ingénieurs de Volvo ont beaucoup appris sur la manière dont les Chinois assemblent une voiture électrique de manière beaucoup plus efficace. Nous devrions choyer ce savoir-faire et en tirer parti. Soit dit en passant, ce n'est pas un fabricant chinois, mais un fabricant européen qui a été le premier à convertir un site à la production de voitures électriques, pour apprendre les ficelles du métier, puis à fermer cette même usine. Cela s’est passé à Forest, très récemment. Et que penser des prises de position de Donald Trump. Finalement d'où vient le vrai danger ? De l'Est ou de l'Ouest ?
