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Premier essai / Porsche Cayenne : Pavillon de complaisance

Rédigé par Gaetan Philippe le

La 2e refonte du Cayenne met tout en œuvre pour relancer la cote d’amour de ce qui fut le SUV superlatif et la Porsche la plus décriée. Ce haut de gamme devient une symbiose mieux essorée des gênes des Carrera, Cayman et Panamera…

Le concept

Porsche ne s’est jamais écarté de son concept traditionnel – la 911 Carrera et, de manière plus globale, la sportive à 2 portes dans ses 3 variantes de carrosserie (coupé, cabrio et targa) – qu’avec réticence et après avoir mis de son côté la certitude d’avoir préservé l’ADN de la marque. C’est ainsi qu’elle vint au SUV (Cayenne) bien après BMW (X5) et Mercedes (ML). Si le Cayenne gardait le faciès et la fibre sportive typiquement Porsche, son look monumental et sa parenté avec le VW Touareg déplaisaient aux puristes. Le modèle de 2e génération perdit du poids non sans gagner en homogénéité esthétique, mais pas autant que le plus petit Macan qui, au contraire du Cayenne, fut apprécié dès son lancement. 

Ce qui change

Plus long au verdict du mètre-ruban, tant en paraissant mieux proportionné, le Cayenne 3e du nom nous revient refondu après s’être inspiré de la silhouette aux volumes parfaitement équilibrés de son jeune frère. Pas seulement, car il n’est pas qu’un grand Macan. Le Cayenne existe aussi en V6 mais garde le privilège des V8 ; le Macan se contente lui de 6 cylindres, voire même d’un 4 cylindres en offre d’accès. Le cadet a une fibre plus jeune et sportive pour proposer la boîte robotisée à 8 vitesses et à double embrayage PDK sans alternative, alors que le Cayenne de 3e génération marque toujours sa préférence pour le confort ouateux de la boîte à convertisseur hydraulique Tiptronic à 8 rapports Aisin AW encore améliorée. Le grand SUV de Porsche s’allonge de 63 mm sur un empattement inchangé (2895 mm) et s’élargit de 23 mm tout en perdant 9 mm de hauteur ; il suit la tendance des 4x4 huppés à être plus effilés (plus bas de toit) tout en forçant encore un peu leur carrure. Ainsi, la surface frontale (S) du modèle a augmenté de 2,81 à 2,83 m2 pour un Cx en diminution de 2 points (0,36 à 0,34) pour arriver à un bilan SCx en progrès (0,962 à 1,012). La face avant accentue l’horizontalité des prises d’air et la tridimensionnalité du capot (Power Dome), le tout entouré d’ailes dodues typiquement Porsche. La tombée de la ligne de pavillon sur une face arrière remodelée apparaissent plus inédits sur un Cayenne. Comme sur les dernières 911 et Panamera, un bandeau lumineux lisse traverse le bord de poupe. Le coffre contiendrait 100 litres de mieux – en capacité minimale (5 places occupées) –    que celui du Cayenne sortant, alors que sa poupe ne paraît pas plus protubérante. Le spoiler couvrant la partie supérieure de la lucarne arrière dissimule un aileron « croque-mitaine » à 5 positions (0°, 6°, 12,6°, 19,9 ° et 28,2°). Dans cette dernière position la plus élevée, ce flap bascule en position aérofrein (Airbrake), comme une 911 Turbo ou… une McLaren… C’est la première fois qu’un SUV se pare d’un déflecteur de toit adaptatif.

L’habitacle a bien évolué, grâce à une planche de bord plus chic et sobre, donnant l’impression de moins manger l’espace, de réserver davantage de liberté de mouvement devant et autour d’un nouveau système d’infotainment.   

Cayenne, Cayenne S et Cayenne Turbo : la nomenclature des 3 modèles à essence du lancement commercial ne change pas… sauf qu’elle ne désigne plus les motorisations en tant que telles, mais les niveaux de puissance. Tout ça sachant que le Cayenne ne peut compter que sur des V6 et V8 suralimentés. L’appellation turbo du Cayenne le plus puissant – 550 ch – n’a plus de sens (parce qu’il a un V8 bi-turbo), pas plus que celle des autres, le Cayenne de 340 ch (V6 turbo) et le Cayenne S de 440 ch (V6 biturbo). Cette incohérence dans les désignations se retrouve sur les nouvelles 911 et Panamera, sur le Macan mais pas sur les 718 Cayman/Boxster. Lorsque tous les moteurs Porsche seront suralimentés sans exception, la particule Turbo tombera sans doute d’elle-même ; à moins que les pontes de la stratégie produits s’échinent à considérer qu’elle suffit à grandir le modèle locomotive qui la porte. Ça vire alors au baratin de marketing, au battage d’air donc ! Excusez-nous de nous sentir concernés d’abord par les démarches plus concrètes des ingénieurs châssis, moteurs, électromécaniciens…   

Alors que ces 3 motorisations à essence – conçues pour être hybridables à discrétion – étaient disponibles à ce premier contact, nous n’avons trouvé le temps de conduire que les 2 V6 340 ch et 440 ch. Des moteurs que l’on retrouve – tout comme le V8 biturbo de pointe de 550 ch, du reste – sur la nouvelle Panamera, avec 10 ch de moins pour le turbo et la même puissance pour le biturbo. Accolés à une transmission Tiptronic à convertisseur hydraulique, ces V6 égrenent leurs 8 vitesses avec une célérité moins tranchée, voire un cadencement plus lisse que leurs homologues à boîte PDK. L’enjeu pour le Cayenne est davantage le raffinement classieux que la performance ultime.        

Comment ça roule ?

Impossible, sur ces premiers tours de roue, de mettre la main sur un exemplaire équipé des nouveaux freins à disque PSCB (plus de frictions, moins de poussières donc de particules polluantes). Traités au carbure de tungstène, montés en série sur le Cayenne Turbo (en options sur les 2 autres), ces disques en fonte sont 3 fois moins chers que les freins en carbone céramique PCCB toujours proposés en option. Ils se distinguent des autres (des Brembo italiens, notamment) par un énorme étrier japonais à 10 pistons Akebono dont la forme en demi lune couvre pratiquement la moitié de leur surface. Seule contrainte : ces très grands disques ne trouvent place qu’accolés à des roues d’au-moins 20”. Nous donnerons un avis à l’occasion d’un essai détaillé. Pour le reste, le parcours choisi pour cette 1ère découverte – les routes incroyablement sinueuses de l’est de la Crête – a mis en valeur la nouvelle perte de poids du modèle. Le Cayenne de base revient sous la barre des 2 tonnes en perdant 55 kg. Le S a maigri de 65 kg mais reste au-dessus de cette barrière fatidique.

Le Turbo ne perd que 10 kg dans ce changement générationnel. L’agilité du nouveau Cayenne lui vient aussi de son train arrière directionnel – une option inspirée de ce qui s’est fait sur la 911 et jusqu’ici inconnue du grand SUV – et d’un contrôle antiroulis actif plus rapide (électrique à 48 volts plutôt qu’hydraulique), sans oublier les innombrables aides à la conduite que nos interlocuteurs avaient prévues pour nous empêcher d’avoir toute notre tête sur la route. Derrière primeur : c’est aussi la 1ère fois que le Cayenne a des roues plus larges à l’arrière qu’à l’avant. Cette monte asymétrique, qui débute à 19”, lui garantit des attitudes routières encore plus dynamiques, plus Porsche encore, même s’il se dépatouille encore pour la forme en tout terrain.

Budget/équipement

Le nouveau Cayenne S coûte 95.202,80 € (3.0-V6 Turbo de 440 ch). L’ancien (3.6-V6 de 420 ch) est toujours affiché à 88.184,80 €. La différence vient d’une dotation de série plus fournie, notamment les phares à diodes, l’assistant au freinage avec protection prédictive des piétons, le régulateur de croisière avec limiteur de vitesse, les ParkAssist avant et arrière, sans oublier les jantes de 19”, la navigation online, le module de téléphone LTE et le châssis actif standard sur le S. Pas moins de 10 assistants de conduite sont proposés en option.

Les concurrentes

Le remplacement du Cayenne arrive à point nommé puisque tous ses rivaux les plus sérieux ont effectué le leur assez récemment (Audi Q7, BMW 5, Mercedes GLE, Range Rover Sport), le tout dernier en date étant le Range Sport (non encore conduit). N’oublions pas les nouveaux venus : le Maserati Levante et l’Alfa Stelvio (plus comparable à un Macan)… Plus haut en gamme encore, toujours massifs et carrés, les Bentley Bentayga et Lamborghini Urus répondent présents comme pour dire que les tout gros SUV ont encore un certain avenir. Un cran plus bas, le Cayenne, lui, n’a pas eu besoin d’une déclinante à toit tombant de coupé pour suggérer le dynamisme et plaire comme tel, au contraire des BMW X6, Mercedes GLE Coupé, Range Rover Velar.

Notre verdict

Le Cayenne de 1ère génération était perçu comme un intru qui mimait lourdement les aptitudes d’une vraie Porsche. Aujourd’hui, c’en est une à part entière. À condition de mettre la main à la poche pour le doter d’options chères et valorisantes – comme s’il ne l’était pas assez dans la dotation prévue par le prix d’accès.

Dans cet article : Porsche, Porsche Cayenne

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